lundi 21 décembre 2009

Etats-Unis d'Afrique

Structure, régime politique et frontières des Etats-Unis d’Afrique : une problématique de conciliation du fédéralisme (africain) aux exigences de souveraineté des Etats membres.

Par John NKOKO LIPAMBALA

Enseignant et chercheur à l’Université de Kisangani/ Kisangani. République démocratique du Congo. Tél : +243 998506935, +243 85 370 24 33 E-mail : jdlipambala@hotmail.com

Résumé

L’Afrique reste l’un des continents qui pose trop de problèmes au reste du monde. Son retard sur le plan de développement suscite beaucoup d’inquiétudes de la part de la communauté internationale. La prise de conscience de cet état de chose a déjà été faite dès les premiers jours des indépendances. C’est ainsi que plusieurs modèles de développement ont été conçus pour sortir le continent de cette situation. Toutefois, ces expériences n’ont pas donné des résultats escomptés pour plusieurs raisons dont la division qui a été à la cause de plusieurs conflits. Le caractère bipolaire du monde pendant la guerre froide a également joué un rôle négatif à la construction de l’Afrique.

Les intellectuels africains et les politiques ont, après avoir fait la lecture de leur passé, trouvé la nécessité de penser au décollage de l’Afrique dans un projet fédératif des tous les Etats du continent. Ce qui pourra donner à cette union la chance d’avoir droit au chapitre dans l’échiquier mondial.

Dans le stade actuel, la fédération de tous les Etats africains dans un ensemble plus dynamique est devenue un principe accepté par la majorité des Etats. Cependant, il se pose alors certains problèmes consistant à intégrer ces Etats qui trouveraient cette union comme un frein à l’exercice de leur souveraineté. Parce qu’en fait, le fédéralisme accepté comme mode de gestion de cette union suppose l’abandon d’une partie de souveraineté des Etats. Au cas contraire, c’est plutôt l’idée d’une confédération qui devrait guider les responsables africains. La confédération implique l’égalité des Etats qui gardent chacun sa souveraineté mais acceptent de coopérer dans certains domaines, ce qui ne peut pas favoriser l’unité africaine.

En adoptant pour les Etats-Unis d’Afrique, le mode de gestion fédérale se matérialise au moyen d’une structure étatique favorisant à la fois l’autonomie des États fédérés et une solidarité entre ceux-ci. On serait en présence d’un grand gouvernement avec les principes qui le régissent dont l’autonomie et la participation. La répartition des compétences donne lieu aux frontières entre l’Union (Etats-Unis d’Afrique) et les Etats membres.

Ainsi, cet exposé se veut une discussion de la structure et du régime politique des Etats-Unis d’Afrique posant ainsi les frontières entre le grand ensemble et les membres qui le composent. Il s’agit pour nous de discuter des institutions à mettre en place tout en permettant la participation et l’autonomie des Etats, en dépit du fait que cette autonomie ne sera plus totale. Elle devrait être fragmentée mais intégrée dans un système qui est les Etats-Unis d’Afrique.

Il est pour nous question de concilier les positions de « souverainistes » et de « fédéralistes » dans la formation des Etats-Unis d’Afrique. Telle sera l’hypothèse qui guidera notre communication.

Introduction

La création de l’Etat en Afrique est une œuvre qui parait être en dehors des aspirations africaines mais plutôt une conséquence de l’histoire. En effet, les espaces étatiques africains actuels sont le fruit du découpage du continent par l’Acte de berlin. Les grandes puissances européennes avaient consacré, dans un « acte général », deux principes essentiels de la colonisation. Le premier a proclamé la liberté de navigation sur le Niger et le Congo et la liberté de commerce dans le bassin du Congo ; le second, aux objectifs plus vastes, développa la théorie des zones d’influence : chacune des puissances contractantes pouvait revendiquer l’annexion de territoires occupés en reculant indéfiniment ses frontières jusqu’à ce qu’elles rencontrent une zone d’influence européenne voisine. Cette extension territoriale suppose une occupation effective et une notification immédiate des accords conclus avec les dirigeants autochtones aux autres puissances contractantes.

La configuration des Etats actuels est sortie de ces principes auxquels les indépendances se sont conformées pour la libération des activités politiques et l’octroi de la souveraineté. Ce partage du continent n’a donc pas tenue compte des ethnies et des particularités de chacun des territoires. Ce qui a guidé l’occupation, c’est plus le souci d’exploitation économique et les intérêts de grandes puissances. Ainsi, plusieurs interprétations de l’Etat en Afrique privilégiant l’une ou l’autre thèse sont légions. Il s’agit entre autre des thèses de l’Etat importé (Badie1992), de la panne de l’Etat (Salamé1996) et de greffe de l’Etat (Bayart1996) en Afrique. Toutes ces explications ont pour tronc commun la recherche des causes de tant de problèmes qui ne permettent pas le décollage du développement en Afrique.

Si ces tentatives d’explications sont d’ordre purement scientifique, il convient de souligner que plusieurs Etats africains avaient dans l’histoire tenté de mettre en place un certain nombre de modèles de développement dont le l’objectif fut de chercher le modèle qui conviendrait le mieux en Afrique. L’Afrique a une histoire politique qui n’est pas à confondre avec celle d’autres continents. L’organisation traditionnelle africaine s’est transformée au choc de la traite des noirs et de la colonisation. Ces deux faits historiques ne peuvent pas ne pas donner une explication à la naissance et au fonctionnement des Etats africains.

C’est ainsi qu’après plusieurs efforts de cohésions nationales, les leaders politiques et intellectuels africains ont vu la nécessité de penser à la cohésion continentale. Il s’agit de mettre en place les mécanismes d’unification du continent. Les regroupements sous-régionaux constituent les exemples de ce vouloir vivre collectif africain, bien que ces expériences n’ont pas toujours réussi partout à intégrer les nations obligées à se constituer par le sort de l’histoire. Les conflits armés entre les Etats et les rébellions continuent à mettre en doute toutes les initiatives de l’intégration africaine. Ainsi, le projet de l’intégration des Etats africains au sein des Etats-Unis d’Afrique est devenue une sauce qui,à notre avis,pourra apaiser la soif de l’unité africaine. Il ne s’agit pas d’un Etat uni, mais plutôt d’un projet fédératif des Etats déjà constituées au sein d’un grand ensemble en vue de constituer une force au niveau mondial compte tenu des enjeux actuels de la globalisation.

A ce niveau, il se pose donc le problème de concilier les différentes souverainetés dans une fédération. Les questions fondamentales qui se posent peuvent se résumer à celle des structures (organes), du fonctionnement de la fédération (régime politique) et de ses frontières. En d’autres termes, il est pour nous question de donner une réponse pouvant contribuer à alimenter les débats sur la forme que peut prendre cette organisation appelée à réunir les différents Etats souverains dans un ensemble plus complexe, sur le fonctionnement et les limites des Etats-Unis d’Afrique.

La théorie du fédéralisme par association nous permet de conduire notre discussion sur la constitution de cette union continentale. Cette idée avait déjà été proposée par Raymond Aron en la qualifiant de la fédération planétaire pour la recherche de la paix internationale. Avec la fédération planétaire, la communauté de culture est préservée, elle renonce seulement aux pouvoirs dont l’unité supérieure a besoin pour assurer la défense et le bien-être de tous (Aron1984 :738). Les pouvoirs auxquels les Etats doivent renoncer ne sont autre chose que la souveraineté. C’est cette expérience que veut vivre l’Afrique dans sa composition d’Etats indépendants et souverains pour devenir une fédération. Tel est l’effort intellectuel que nous consentons à travers les lignes qui suivent.

Pour y parvenir, nous avons jugé nécessaire de subdiviser notre propos en trois parties. La première essaie de préciser le contour du fédéralisme dont il est question dans cet ensemble continent et donne quelques explications sur la souveraineté. La deuxième est un essai de proposition de structures pouvant permettre aux Etats-Unis de fonctionner, elle est aussi une tentative d’explication du régime politique susceptible de contribuer à la consolidation de l’Union et la troisième discute des frontières de cet ensemble appelé à intégrer les différentes forces du continent africain.

Du fédéralisme et de la souveraineté

En se mettant d’accord sur le projet des Etats-Unis d’Afrique, nous pensons que les leaders politiques et les intellectuels africains ont cherché à privilégier trois options qui sont la constitution d’une force pour faire place à la compétition économique, promouvoir la solidarité entre les Etats membres fédérés et les valeurs de paix et de justice en vue d’atténuer ou d’éradiquer les conflits politiques interétatiques qui constituent un frein au développement des pays Africains.

Le fédéralisme permet la réalisation de ce projet de par sa définition. En effet, cette forme d’organisation permet à des collectivités politiques de s’unir, tout en conservant leur autonomie locale, sous l’autorité d’un pouvoir unique et souverain, établi constitutionnellement. Il s’agit ici du fédéralisme dans un Etat uni. La souveraineté appartient au seul Etat fédéral. C’est dans cette optique que Braud affirme que l’Etat fédéral instaure une fragmentation juridique de l’espace plus poussée, même si celui-ci demeure une unité politique sur l’arène internationale (Braud 2006 : 139). Il s’agit ici de la conception interne du fédéralisme au sein de l’Etat entendu comme une entreprise politique de caractère institutionnel dont la direction administrative revendique avec succès , dans l’application des règlements , le monopole de la contrainte physique légitime( Weber1995 :97). Dans cette logique, l’on ne parlera pas de souveraineté des Etats fédérés.

Dans la présente réflexion, nous avons retenu les principes du fédéralisme mais dans leur application du fédéralisme par association.. Il s’agit donc pour nous du regroupement d’États au sein d’une ligue ou d’une union. A ce stade, une confusion peut être possible entre la fédération et la confédération. Il est donc important de retenir que la confédération n’exige rien de la souveraineté des Etats membres. Les Etats confédérés se mettent d’accord pour coopérer sur un certain nombre de matières, chacun gardant sa souveraineté dans son ensemble. Le seul point qui les unit c’est celui pour lequel ils ont signé un traité de coopération. En dehors de cette matière, les Etats sont libres d’agir en toute liberté et en toute indépendance.

Dans la fédération par association, les Etats fédérés s’unissent pour tout ce qui concerne le fonctionnement d’un Etat moderne. Ils mettent ensemble leurs forces respectives pour constituer une force fédératrice. C’est donc une union des forces[1] pour créer une force des forces et non une force unie. Ce qui revient à dire que la force constituée dans la fédération internationale n’est pas la fusion des forces étatiques existantes mais leur somme intégrée. Le respect de chaque membre est fonction de son degré intégration et de son vouloir fédératif, gage de l’union et de la solidarité entre les membres.

Dans tous les cas, les principes sur lesquels se fonde le fédéralisme sont l’autonomie et la participation. Ces deux grands principes constituent la clé de fonctionnement du fédéralisme, peu importe le degré de son application, interne ou international.

L’autonomie dont jouissent les Etats fédérés se comprend par rapport aux institutions dont ils disposent pour leur fonctionnement tout en restant membre de la fédération. Il s’agit d’une vraie répartition constitutionnelle des compétences. Les Etats fédérés disposent des institutions qui leur permettent de bien intégrer l’Etat fédéré dans la fédération. Ce sont des institutions que nous pouvons appelées fédérées « fédéralisantes». Ces institutions doivent être tantôt des institutions choses comme la constitution tantôt des « institutions organes », tel est le cas du parlement et du gouvernement voire même des cours et tribunaux. La valeur des ces institutions ne se comprend que dans leur aptitude à contribuer à l’union de l’ensemble.

La participation implique l’appropriation de l’union par les Etats constitutifs. Elle postule de la mise en place des institutions où les différentes forces en présence se retrouvent et les décisions doivent être prises par un mécanisme de cohésion, ce qui pourra atténuer le risque séparatiste résultant des frustrations. Au niveau d’un Etat, on parle plus du caractère bicaméral du parlement.

De son côté, la souveraineté avec ses deux dimensions interne et externe. Sur le plan interne l’Etat constitue l’autorité suprême au- dessus de laquelle la présence de toute autre autorité est impensable, sinon ce serait l’absence de l’Etat. Toutes les autres institutions lui sont soumises par les lois qu’il édicte. Sur le plan externe, elle implique l’indépendance et l’égalité des tous les Etats dans l’ordre international. Le territoire de chaque Etat ne doit donc pas faire l’objet d’une ingérence extérieure, ce qui constitue une violation de souveraineté.

Cependant, dans les relations interétatiques, le respect des engagements internationaux ne constitue en rien une faiblesse des Etats mais au contraire, il est la confirmation de sa souveraineté par le fait la prise des engagements est un acte de souveraineté. Leur respect serait la traduction de ce qu’on a pris de façon souveraine. Le principe de « pacta sunt servanda » veut tout simplement pousser les Etats au respect des engagements qu’ils sont souverainement pris.

Il sied de noter que la configuration des échanges internationaux avec la globalisation invite à repenser autrement la souveraineté. Les Etats sont appelés coopérer dans plusieurs domaines qui souvent transforment les relations internationales. Les différents Etats souverains arrivent à aliéner une partie de leur souveraineté au profit de l’union constituée. La constitution des grands ensembles rend plus compétitifs les Etats dans la scène internationale. L’exemple de l’union européenne constitue un cas illustratif de l’intégration des souverainetés, tout en soulignant cela n’est qu’un processus qui poursuit son bon chemin.

Le monde actuel, avec l’évolution qui le caractérise, appelle à repenser l’adaptation de la souveraineté aux exigences de la compétition planétaire. David Acaud et Laurent Bouvet précise que plusieurs facteurs (la mondialisation, les processus d’intégration régionale, la multiplication des formes de contestation du pouvoir central, les terrorismes) ont concouru à mettre en cause la manière dont les compétences de l’Etat sont en mesure de s’exercer (Acaud et Bouvet 2004 :356).

L’Afrique se propose un modèle des Etats-Unis d’Afrique. Ce qui est une sorte de fédéralisme des Etats déjà constitués en entités souveraines. L’imagination d’une structure appropriée peut favoriser la réussite d’un tel projet fédérateur. Ce qui veut tout simplement dire qu’il n’y a pas d’institutions prêtes à porter pour le fédéralisme tant national qu’international. Nous voulons à présent soumettre à la discussion scientifique nos propositions de réflexion sur les Etat-unis d’Afrique.

Structure et régime politique des Etats-Unis d’Afrique : contribution africaine à la fédération des Etats africains.

La mise en place des Etats-Unis d’Afrique dans l’optique d’un fédéralisme conduit à la mise en place des organes susceptibles de favoriser l’autonomie des Etats membres tout en privilégiant leur participation.

Ainsi, dans le stade actuel, l’union africaine, qui a remplacé l’OUA depuis lors du sommet de Durban en juillet 2002, a mis en place des organes ci-après : la Conférence des chefs d’État et de gouvernement, qui doit se réunir au moins une fois par an ; le Conseil exécutif, qui succède à l’ancien Conseil des ministres de l’OUA et réunit les ministres des Affaires étrangères ; le Comité des représentants permanents, composé des ambassadeurs des États membres résidant à Addis-Abeba ; et la Commission, qui remplace l’ancien secrétariat général. Le projet de la mise en place d’autres institutions comme le Parlement panafricain, une Cour de justice, un Conseil économique, social et culturel et des institutions financières (Fonds monétaire africain, Banque centrale) mérite bien d’être soutenu en vue du bon fonctionnement de l’Union.

Cette structure est certes d’une importance capitale pour la matérialisation des projets de l’union africaine. Notre contribution à ce niveau consiste à voir si ces organes peuvent contribuer à la réussite des Etats-Unis d’Afrique qui, à notre avis, est plus qu’une simple union dont la forme serait semblable à une confédération. Les Etats-Unis d’Afrique est un véritable fédéralisme. C’est pourquoi nous pensons que ce qui doit être privilégié dans cette optique, c’est plus le souci de l’intégration politique qui doit pousser à la longue à l’intégration économique. L’on nous contredirait en disant que le cas européen est parti de l’intégration économique pour arriver à l’intégration politique qui est en cours. La réponse à cette critique pourrait être le contexte de la création des Etats en Afrique. D’ailleurs, ce qui a plus milité à la création de l’Etat-nation pour bon nombre des pays, c’est l’intégration politique qu’au sein d’un ensemble convenu pour devenir la nation. Le cas de

Les ambiguïtés des rapports entre les guerres civiles et le sous-développement en Afrique

Les ambiguïtés des rapports entre les guerres civiles et le sous-développement en Afrique

Par Guilain MATHE MAGHANIRYO

La présente réflexion part du débat suscité par une thèse soutenue par certains spécialistes des guerres civiles en Afrique. Thèse selon laquelle ce sont la pauvreté et le sous-développement qui sont à la base de ces affrontements. Aussi, jugeons-nous opportun de (res) susciter le débat autour de la relation dialectique entre la pauvreté (le sous-développement au sens large) et l’émergence des conflits armés (qui prennent la forme récurrente de guerre civile en Afrique) avec l’objectif d’ouvrir à de nouvelles pistes de réflexion sur la question.

En effet, dès le lendemain des indépendances, le continent africain s’est tristement illustré dans les explosions des conflits armés aux enjeux multiformes. Aussi vrai que le faisait remarquer Peter ANYANG’NYON’O en 1996, l’Afrique « se présente à la face du monde comme un vaste champ de bataille où s’affrontent pêle-mêle armées nationales, milices partisanes, populations civiles »[1]. Non sans des graves conséquences. A en croire Philippe HUGON, entre 1945 et 1995, plus d’un quart des conflits mondiaux ont été localisés en Afrique avec plus de 6 millions de morts sur des populations de 160 millions de personnes (Soudan, Ethiopie, Somalie, Mozambique, Angola, Ouganda, Rwanda, Burundi, Sierra Leone). Depuis 1990, 19 conflits majeurs ont été localisés dans 17 pays. La baisse des conflits majeurs en Afrique entre 1990 et 1997 a fait place à une reprise entre 1998 et 2000 (11 conflits par an)[2]. Le rôle de la pauvreté et du sous-développement caractérisant de nombreux Etats africains déchirés par ces conflits n’a jamais fait l’unanimité parmi les spécialistes des guerres civiles.

Peut-on soutenir la thèse selon laquelle ces paramètres (pauvreté et sous-développement) seraient fondamentalement à la base de ces affrontements ? C’est à cette préoccupation que s’efforce de répondre le présent exposé. Dans une approche dialectique[3], la présente réflexion se propose de relever et démêler les rapports de causalité réciproque (et apparemment contradictoires) entre la pauvreté et le déclenchement des conflits armés en se basant sur des exemples typiquement africains. De cette lutte des contraires se dégagera une synthèse qui mettra clairement en évidence notre point de vue sur la question.

La rareté des ressources : facteur déterminant dans le déclenchement des conflits en Afrique ?

Nombreux analystes de guerres civiles en Afrique soutiennent que l’émergence de ces conflits a pour cause, entre autres, la pauvreté et le sous-développement dans la région. Selon la Banque Mondiale, la pauvreté est un phénomène multidimensionnel qui traduit une situation dans laquelle les gens sont incapables d’assurer leurs besoins humains fondamentaux. Ainsi, les pauvres perdent le contrôle sur des ressources nécessaires pour s’assurer l’éducation et la santé de base et sont frappés de la malnutrition, le manque de logement, le faible accès à l’eau et à l’assainissement. Comme le fait remarquer la Banque Mondiale, les pauvres sont de ce fait vulnérables aux violences, à la criminalité, au manque de liberté politique et d’opinion[4]. Il y a peu, le rapport du PNUD indique qu’en début des années 2000, plus d’un milliard de personnes (soit une personne sur cinq) vivent dans une pauvreté abjecte (avec la parité du pouvoir d’achat inférieure à 1 dollar par jour)[5] ; et c’est l’Afrique (subsaharienne pour une grande partie) qui porte le fardeau d’avoir la plus grande proportion de personnes pauvres (47,67%)[6]. Selon la classification de la Banque Mondiale en 2002, des 63 pays à faible revenu, 38 sont situés en Afrique subsaharienne[7] et, paradoxalement, ces derniers sont dans la grande majorité associés à la trentaine des pays qui ont connu l’expérience des conflits intra-étatiques sur les 53 Etats africains. Cependant la place de la pauvreté dans le déclenchement et l’entretien de ces conflits mérite d’être bien disséquer.

L’accès aux ressources économiques ne constituent pas moins une motivation des antagonistes, en même temps qu’un enjeu de poids, dans le déclenchement et le déroulement des conflits en Afrique. Cette réalité est perceptible tant au niveau de la société étatique globale qu’au niveau des entités individuelles et collectives. Outre l’acquisition des données géostratégiques et les motivations liées au sentiment d’appartenance identitaire, les spécialistes de la géopolitique soulignent que l’une des chaînes causales de la conflictualité, quels que soient l’époque et le lieu, tient à la lutte pour les ressources : matières premières, minières, agricoles ou industrielles. Il s’agit de s’emparer de richesses, pour le profit d’un Etat, parce que celui-ci peut ainsi, en s’enrichissant, augmenter sa puissance[8]. Cette logique tout à fait justifiée pour les Etats dans une approche géopolitique stato-centrée, vaut aussi pour les groupes armés infra-étatiques autant qu’aux acteurs individuels car ils ont eux aussi besoin de ressources pour survivre ou accroître leur puissance. Appliquée à la réalité africaine, il est ordinaire de voir émerger les insurrections armées reprochant à leur détracteurs une appropriation des ressources par une élite aristocratique et une mauvaise redistribution du revenu national. Malheureusement dans de nombreux cas, une fois au pouvoir, ils ne reproduisent que les mêmes griefs reprochés aux prédécesseurs.

En fait, selon le Fonds des Nations Unies pour la Population, le taux moyen de fécondité pour l’Afrique en 2000 est d’environ 6%, avec la population la plus jeune du monde[9]. La plupart de ces jeunes sont au chômage et vivent dans des zones urbaines, avec des implications sociales et sécuritaires non négligeables. Or si les jeunes sont confrontés à l’esprit de pauvreté, ils sont plus favorables à rejoindre une insurrection armée qui leur offrirait ou promettrait les meilleures conditions d’existence. C’est dans ce cadre qu’il convient de comprendre le fait que la rébellion en Côte d’Ivoire a recruté la plupart des combattants parmi les jeunes désœuvrés vivant dans des quartiers populaires et d’autres milieux où règnent précarité, oisiveté et pauvreté. Cela est tout aussi vrai pour la rébellion Sierra Léonaise sur fond d’exploitation du diamant, la double révolte touareg au Mali et au Niger[10], la nébuleuse des milices à l’Est du Congo-Kinshasa avec la délicate problématique de la réinsertion des enfants-soldats[11].

Dans cette perspective, Jean-Marie BALANCIE et Arnaud de LA GRANGE décrivent l’Afrique subsaharienne comme un terreau propice à de nombreuses formes de violence politique. Pour ces auteurs en effet, les violences politiques en Afrique constituent une réplique à l’instabilité, à l’insécurité, au sous-développement, à la pauvreté, au déséquilibre socioéconomique : « pour qui dénonce la partialité de l’Etat, le dysfonctionnement du gouvernement ou l’inéquitable répartition des efforts de développement au profit de certains groupes ethniques ou de certains terroirs privilégiés, la pratique de la lutte armée apparaît dans l’Afrique des années 80-90, comme l’un des seuls modes de contestation vraiment efficaces »[12].

La frustration collective due à la disparité de la répartition des ressources économiques, accentuée par une inégale redistribution du revenu national ; là réside de toute évidence un ingrédient de taille dans le déclenchement de la conflictualité en Afrique. Cependant une relativisation de ce facteur mérite d’être minutieuse mise en évidence dès lors que les guerres civiles en Afrique sont loin d’être l’apanage du seul fait de la pauvreté du sous-développement.

Pauvreté et conflits en Afrique : la symétrie d’une causalité relative

Loin d’être une fatalité, les guerres civiles en Afrique se révèlent par ailleurs comme un arsenal d’acteurs et d’enjeux avec des conséquences fâcheuses sur le développement des pays en conflits. Les guerres civiles en Afrique révèlent en effet une complexité de facteurs de causalité, et la pauvreté qu’elles impliquent s’avère la résultante d’une série de facteurs à la fois endogènes et exogènes qui induisent le sous-développement comme conséquence majeure. Plusieurs facteurs plaident en faveur de cette réalité. Il est vrai, comme l’affirme Philippe HUGON, l’accaparement des richesses naturelles constitue à la fois le financement et l’enjeu des conflits : « on peut ainsi différencier les guerres liées au pétrole (Angola, Casamance, Congo, RCA, Soudan, Delta du Niger au Nigeria), au diamant (Angola, Guinée, Liberia, Nord de la Côte d’Ivoire, RDC, Sierra Leone), aux métaux précieux (or, coltan à Bunia en RDC), au contrôle de l’eau (riverains du Niger et fleuve Sénégal), aux narcodollars, au contrôle des ressources (coton au Nord de la Côte d’Ivoire, café et cacao au Sud), des ressources forestières et des terres (Burundi, Côte d’Ivoire, Darfour, Rwanda) »[13].

Force est de réaliser que la prétention de nombreux rebelles à assurer une meilleure redistribution des ressources nationales pour le bien-être de tous n’est qu’un simple prétexte qui voile en réalité la cupidité et d’autres agendas cachés des acteurs visibles et invisibles des guerres civiles. A ce titre, on réalise aisément que dans la plupart des rébellions, les mouvements rebelles n’ont pas d’agenda politique cohérent, mais sont plus intéressés par le pillage des ressources de l’Etat et de s’enrichir eux-mêmes ainsi que leurs disciples. C’est dans ce sens que David KEEN, sans méconnaître des facteurs d’ordre politique et sécuritaires dans leur déclenchement, soutient que les guerres civiles dans la plupart des pays en développement sont surtout une exploitation économique par les segments de l’élite dont l’aspiration a été contrecarrée par les élites concurrentes. A en croire l’auteur, les mouvements tels que National Patriotic Front of Liberia (NPFL), le Revolutionary United Front (RUF) de la Sierra Léone et le Mouvement Patriotique de la Côte d’Ivoire (MPCI) n’avaient pas de politiques claires à l’ordre du jour : leurs dirigeants sont plus des chefs d’entreprise que des dirigeants politiques[14].

Une telle reproduction des antivaleurs exacerbe plutôt le fossé de la pauvreté et du sous-développement. Il traduit la réalité des guerres menées au bénéfice des belligérants et leurs parrains étrangers, mais dont les paisibles populations paient par trop le lourd tribut. Cette logique démontre en toute évidence combien les guerres civiles constituent un facteur exacerbant la pauvreté et le sous-développement. Comme le fait remarquer Philippe HUGON, « les conflits réduisent la croissance économique et inversement de nombreux pays sortant des conflits connaissent une croissance rapide (Mozambique, Rwanda). Ces relations statistiques sont toutefois peu significatives en terme de sortie de trappes à sous-développement »[15]. C’est ainsi que l’Eglise Catholique n’a cessé de mettre en évidence la relation dialectique qui existe entre les conflits et la pauvreté, spécialement en Afrique. Se mettant à la suite de son prédécesseur PAUL VI pour qui « le développement est le nouveau nom de la paix », le pape JEAN-PAUL II soulignait déjà en 1993 les répercussions négatives que la situation de pauvreté finit par avoir sur la paix[16]. Vision corroborée par le Pape BENOIT XVI qui réaffirme avec force de taille que « combattre la pauvreté, c’est construire la paix »[17]. Aussi, à propos de la paix et du développement durable en Afrique, le porte-parole de l’Union Européenne à l’ONU affirmait avec justesse à New York, le 1er novembre 2000 : « le développement sans la paix n’est pas plus possible que la paix ne l’est sans le développement »[18].

Conclusion

A terme, il ressort de notre réflexion que la thèse qui situe la pauvreté et le sous développement à la base des guerres civiles en Afrique mérite d’être bien relativisée. La pauvreté et le sous-développement sont-ils des conditions suffisantes pour déclencher la guerre civile ? Pas si évident. Certes, la relation dialectique entre la pauvreté (et le sous-développement) et le déclenchement des guerres civiles est indéniable. Cependant, plutôt que d’être la cause exclusive et absolue des affrontements, la pauvreté se révèle à nos yeux comme un facteur aggravant des conflits armés en Afrique. Cela est d’autant plus vrai qu’il y a des Etats africains reconnus sous-développés depuis de longues années (tels le Benin, le Togo, la Tanzanie, le Botswana, la Zambie, la Namibie,…) mais qui n’ont jamais connu l’expérience lugubre des guerres civiles. De même, certains Etats assez avancés que d’autres (tel l’Algérie) n’ont pas été épargné par le fléau de la guerre. Il est cependant évident que la pauvreté soit une conséquence indéniable de la guerre. Toutefois, dans la mesure où la pauvreté constitue le ciment qui raidit la pente vers le déclenchement et la perpétuation des conflits armés, il va sans dire que l’on ne peut prétendre prévenir des conflits et construire une paix durable sans s’atteler à résoudre la question de la pauvreté et du sous-développement. En ceci, nous nous accordons avec Philippe HUGON pour qui « l’éducation des jeunes, la création et le passage d’économies de rente à des économies productives créant de la valeur ajoutée et des opportunités d’emploi sont des facteurs essentiels de réduction des risques de conflits »[19].

BIBLIOGRAPHIE

1. MATOKO, E., L’Afrique par les Africains. Utopie ou révolution ?, Paris, L’Harmattan, 1996

2. HUGON, P., Géopolitique de l’Afrique, Paris, Sedes, 2007

3. GRAWITZ, M., Méthodes des sciences sociales, 11e édition, Paris, Dalloz, 2001, pp. 441-443.

4. Mesurer la pauvreté”, in http://worldbank.org/poverty/mission/up2.htm

5. Choices”, in Development Magazine, Mars 2003

6. Rasheed DRAMAN (sous la préparation de), Pauvreté et conflits en Afrique : expliquer une relation complexe, Réunion du Groupe d’experts sur l’Afrique-Canada, Addis-Abeba, 19-23 mai 2003

7. Le Groupe Banque Mondiale: Données et statistiques

8. CHAUPRADE, A.et THUAL, F., Dictionnaire de géopolitique : Etats, concepts, auteurs, 2e édition, Paris, Ellipses, 1999

9. KOUASSI Yao, Le processus de formation des guerres civiles en Afrique, notes de cours, DESS Gestion des Conflits et paix, CERAP-Abidjan, 2009-2010.

10. MATHE M. Guilain, « Les pratiques magico-mythiques dans la célébrité des milices mayimayi au Kivu en RDC », in WARA Newsletter, Boston, Spring 2009

11. BALANCIE, J-M. et DE LA GRANGE, A., Mondes rebelles. Acteurs, conflits et violences, tome 1, Amérique-Afrique, Paris, Michalon, 1996

12. Message pour la journée mondiale pour la paix de 1993.

13. Combattre la pauvreté, construire la paix », Message pour la célébration de la journée Mondiale de la Paix, 1e janvier 2009.

14. BANAGOUN Zan, “Armées africaines et développement durable », in Géopolitique africaine : l’Union Africaine à la recherche de la paix, n°23, juillet-septembre 2006.

Guilain MATHE MAGHANIRYO est chercheur-politologue boursier de Scholar Rescue Fund’s Institute of International Education (SRF/IIE). Il se spécialise en Gestion des conflits et paix à l’Ecole de Sciences Morales et Politiques d’Afrique de l’Ouest (ESMPAO/ CERAP) à Abidjan (Côte d’Ivoire).



[1] MATOKO, E., L’Afrique par les Africains. Utopie ou révolution ?, Paris, L’Harmattan, 1996, p. 224.

[2] HUGON, P., Géopolitique de l’Afrique, Paris, Sedes, 2007, p.129.

[3] La dialectique procède par la confrontation de la thèse à l’antithèse pour dégager la synthèse et « elle part de la constatation très simple des contradictions qui nous entourent ». Cfr. GRAWITZ, M., Méthodes des sciences sociales, 11e édition, Paris, Dalloz, 2001, pp. 441-443.

[4] Voir “Mesurer la pauvreté”, in http://worldbank.org/poverty/mission/up2.htm

[5]Choices”, in Development Magazine, Mars 2003

[6] Lire à ce propos Rasheed DRAMAN (sous la préparation de), Pauvreté et conflits en Afrique : expliquer une relation complexe, Réunion du Groupe d’experts sur l’Afrique-Canada, Addis-Abeba, 19-23 mai 2003, pp. 3-4.

[7] Le Groupe Banque Mondiale: Données et statistiques

[8] CHAUPRADE, A.et THUAL, F., Dictionnaire de géopolitique : Etats, concepts, auteurs, 2e édition, Paris, Ellipses, 1999, p.487.

[9] « Fonds des Nations Unies pour la Population, 2000 », Cité par DRAMAN, R., op.cit, p.10

[10] Lire à ce propos KOUASSI Yao, Le processus de formation des guerres civiles en Afrique, notes de cours, DESS Gestion des Conflits et paix, CERAP-Abidjan, 2009-2010.

[11] Cfr. MATHE M. Guilain, « Les pratiques magico-mythiques dans la célébrité des milices mayimayi au Kivu en RDC », in WARA Newsletter, Boston, Spring 2009, p. 15

[12] BALANCIE, J-M. et DE LA GRANGE, A., Mondes rebelles. Acteurs, conflits et violences, tome 1, Amérique-Afrique, Paris, Michalon, 1996, pp. 187-190.

[13] HUGON, P., op.cit, p.133

[14] DRAMAN, R., op.cit, pp.10-11

[15] HUGON, P., op.cit., p.141

[16] Message pour la journée mondiale pour la paix de 1993.

[17] “Combattre la pauvreté, construire la paix », Message pour la célébration de la journée Mondiale de la Paix, 1e janvier 2009.

[18] BANAGOUN Zan, “Armées africaines et développement durable », in Géopolitique africaine : l’Union Africaine à la recherche de la paix, n°23, juillet-septembre 2006, p.78.

[19] HUGON, P., op.cit., p.147

Hommages à Benoît Verhaegen à l'Université de Kisangani

Colloque « Benoît Verhaegen, l’homme et le savant. »

Date : 11-13 janvier 2010

Lieu : amphithéâtre de l’Université de Kisangani à Kisangani

Le Centre de Recherches Politiques et Sociales d’Afrique Noire (CEREPSAN) a le plaisir d’annoncer l’organisation prochaine de son deuxième colloque sur le thème « Benoît Verhaegen, l’homme et le savant ». Ce colloque ne s’inscrit pas dans le programme des activités scientifiques régulièrement prévues pour l’année universitaire en cours. Il correspond plutôt à un besoin urgent exprimé par les débiteurs que sont les chercheurs en sciences sociales de l’Université de Kisangani, en particulier, et des Universités de la République Démocratique du Congo (RDC), en général, celui d’honorer la mémoire de leur créancier que fut Benoît Verhaegen, l’Illustre maître à penser de l’Histoire immédiate et le pionnier de la faculté destinée spécifiquement aux sciences sociales à Kisangani, après le régime restrictif et centralisateur de l’Université Nationale du Zaïre, « UNAZA », en sigle.

Vingt-six ans après la création de la Faculté de sciences sociales, administratives et politiques à l’Université de Kisangani, qui n’a été en réalité qu’un retour-surprise, il est un devoir de mémoire légitime pour tous les universitaires et chercheurs qui ont vu, côtoyé et travaillé avec Verhaegen, et pour les anciens étudiants qui ont connu ses enseignements ou simplement lu ses écrits, de se mettre ensemble et de réfléchir sur l’héritage (savoir, savoir-faire, savoir-être) de cet homme qui, après avoir longuement et bien joué son rôle sur plusieurs scènes du savoir, s’est enfin retiré du monde en octobre 2009. Les communications présentées lors du colloque seront publiées sous le signe de Mélanges offerts à Benoît Verhaegen afin de l’immortaliser et de lui rendre réellement les derniers hommages en toute solennité.


Le colloque entend ainsi donner la parole à tous les participants à travers les axes recoupant les préoccupations qui ont été celles de Verhaegen dans la tradition de l’Histoire immédiate sur la ville de Kisangani. C’est aussi le lieu privilégié pour les méthodologues avisés de relancer le débat sur la portée, la pertinence, les applications, les limites ou faiblesses et les perspectives en termes d’actualités de la méthode et /ou théorie de l’Histoire immédiate tant prisée et usée dans les nombreux travaux des scientifiques de sciences sociales à l’Université de Kisangani, en particulier, et des universités de la RDC, en général. Les guerres, les turbulences, les conflits et violences meurtriers connus au cours de deux dernières décennies au pays, n’ont fait qu’accentuer l’intérêt des chercheurs sur l’applicabilité de cette méthode/théorie. Cet engouement des chercheurs pour l’utilisation de cette méthode/théorie serait-il dicté par les souvenirs forts et ardents de l’expérience interdisciplinaire/multidisciplinaire de Verhaegen qui a systématiquement travaillé sur les rébellions au Congo, les crises sociales comme la prostitution des femmes (femmes libres) et leur dynamisme dans l’économie marchande et informelle, l’histoire de la ville, de l’habitat et des élites politiques, les manifestations de l’ethnicité / du tribalisme dans l’arène du pouvoir politique, la pauvreté, ses formes / manifestations et ses mécanismes de compensation, les contradictions du système d’enseignement supérieur et universitaire congolais, le rôle révolutionnaire des sciences sociales, l’impact des mouvements religieux/messianiques dans le changement sociopolitique, les problèmes de transport, l’enclavement/isolement des certaines entités et leur sous-développement … ? Peut-on aujourd’hui écrire l’histoire ou les histoires sur le quotidien, le vécu des hommes et des institutions, les victoires et les échecs, les créativités ou inventions (dans les domaines politique, économique, social, culturel, etc.) dictées par les conditions de marginalité et de crise sans faire allusion, ne serait-ce que de manière incidente, à l’Histoire immédiate ? Perpétuer une telle tradition ne serait-elle pas qu’une justice faite ?

Les contributions devront s’inscrire -pas exclusivement- dans les principaux axes de recherche suivants.

1.A la rencontre de Benoît Verhaegen

Les contributions s’emploieront à parler de Benoît Verhaegen. Il est question de rappeler ce qu’a été simplement l’homme, de faire découvrir le savant et l’intellectuel engagé, etc. Les communications retraceront la biographie, la trajectoire sociale et professionnelle de l’homme.

2.Epistémologie

Les communications feront l’état des lieux des productions savantes de Benoît Verhaegen. Elles s’interrogeront surtout sur la validité des connaissances produites par Verhaegen et les conditions de leur production.

3.Applications et usages des savoirs

Les contributions devront porter soit sur les travaux fécondés par les questionnements et les théories de Benoît Verhaegen soit sur des papiers recourant à des interrogations alternatives à la pensée verhaegenienne. Il s’agit de relever l’impact de son travail scientifique et les usages qu’en ont fait d’autres chercheurs.

Benoît Verhaegen a beaucoup écrit sur les rébellions au Congo, les crises sociales comme la prostitution des femmes (femmes libres), l’économie marchande et informelle, l’histoire de la ville, de l’habitat et des élites politiques, les manifestations de l’ethnicité / du tribalisme dans l’arène du pouvoir politique, la pauvreté et ses formes / manifestations et ses mécanismes de compensation, les contradictions du système d’enseignement supérieur et universitaire congolais, le rôle révolutionnaire des sciences sociales, l’impact des mouvements religieux/messianiques dans le changement sociopolitique, … ?

4.Actualité et perspectives

Il s’agit de faire le bilan de la recherche à la faculté de sciences sociales, administratives et politiques depuis Benoît Verhaegen pour y distinguer les héritages de Verhaegen. Que est l’héritage scientifique de Benoît Verhaegen ? qu’est-ce qui en a été fait, qu’est-ce qui en reste et qu’est-ce qui peut être fait de l’héritage à la Faculté de sciences sociales de l’Université de Kisangani , ou mieux en sciences sociales? En d’autres termes, peut-on penser l’après- Verhaegen à travers le bilan de la trajectoire intellectuelle/académique, scientifique et éthique de cette Faculté ?

Evidemment, il conviendrait de placer le débat dans le contexte des objectifs poursuivis par l’Université de Kisangani dont les mots-clés se résument par l’enseignement, la recherche et le développement.

Les personnes souhaitant participer à ce colloque doivent envoyer au CEREPSAN, le résumé de la communication, se rapportant au thème général proposé. Les résumés devront parvenir par courrier électronique au Secrétariat du CEREPSAN au plus tard le 02 janvier 2010. Les résumés doivent comporter le titre, les coordonnées et l’affiliation institutionnelle de l’auteur et ne doivent pas excéder une page avec la police « Times New Roman », taille 12, interligne simple. Un comité de sélection indépendant examinera les candidatures et les auteurs sélectionnés seront informés en temps utile pour leur permettre d’apprêter leur texte intégral de la communication à présenter au colloque.

Les propositions de résumés, les communications finales et les questions éventuelles seront envoyées à l’adresse E-mail suivante : cerepsan.melanges.bverhaegen@googlemail.com

Téléphones : +243818562230, +243812005218, +243998506935